BIOGRAPHIEJean-Paul Thaéron
Jean Paul Thaéron est né en 1953.
Formé à l'Ecole des Beaux-Arts de Brest avant d'y enseigner pendant toute sa carrière, Jean-Paul Thaéron est peintre et sculpteur. Fondateur du Groupe Finistère, il développe un univers pictural où les signes tiennent une place prépondérante.
Ses sculptures, toujours colorées, semblent toujours prêtes à s'animer et posent inlassablement la question du rapport entre le socle et l'oeuvre dans sa globalité.
Carnet de traverse VII (Notes 2018-2020)
04/01/2018
Début d'année perturbé. Le physique.
06/01/2018
L'auteur de Painting beyong Pollock, Morgan Falconer apporte des vues nouvelles sur la façon d'articuler les différents courants de la peinture contemporaine. Ses analyses sont originales, mais parfois surprenantes : lorsqu'il classe par exemple les artistes de Supports/Surfaces parmi les Conceptuels.
Il lui arrive aussi de mettre l'accent sur des artistes qui ne le méritent pas vraiment et se fourvoie dans ses niveaux d'appréciation. Après avoir étudier des personnalités comme Rauschenberg, Twombly et David Salle, évoquer l'artiste américaine Mary Heilmann qu'il place à juste titre sous la bannière d'un certain mode décoratif ou Laura Owens avec ses images à la tonalité frivole semble superflu.
Malgré ces réserves, la perspective générale adoptée par l'auteur et sa compréhension des phénomènes artistiques sont à mettre à son crédit. Sa lecture se fait sur une base institutionnelle d'opposition et d'alternance (abstrait/figuratif) de la recherche actuelle dans le domaine pictural. Un ouvrage dont le sujet mérite l'attention.
Regard, à nouveau, sur Dubuffet dont ma première grande rencontre avec l'œuvre eut lieu lors d'une exposition au Grand Palais en 1973.
L'Hourloupe, les Théâtres de Mémoire et les dernières Mires sont remarquables.
L'Hourloupe : l'efficacité visuelle dans une forme de simplicité graphique.
Théâtres de Mémoire : système dont la richesse additive provoque rencontre et collision de forte intensité.
08/01/2018
Pictogrammes.
Aux cours des âges, l'humanité a évolué de l'écriture synthétique à l'écriture analytique puis à l'écriture phonétique.
L'écriture synthétique est une écriture des idées. C'est un système de notation par image. Les traits les plus simples retracent des pensées. Les dessins incisés dans la pierre ou dans l'os par leur symbolique rituelle (arbres, animaux, roues, croix, signes géométriques) ont préparé son éclosion. La lecture de ces écritures reste ouverte.
L'écriture n'est pas le seul moyen d'expression pour accéder au monde des idées. Partant des écritures synthétiques, d'autres voies sont possibles. Une part importante de l'histoire de l'art et la peinture en découlent aussi. La façon dont les chemins bifurquent caractérise la prépondérance donnée soit à la parole soit à la vision.
Tout comme l'écriture, une peinture est composée d'un ensemble de signes. Ce qui la distingue, c'est que leur sens n'est pas défini de façon aussi arrêtée. Ils laissent place à un certain niveau d'interprétation. Ce qui reste encore le cas pour les quipus des Incas du Pérou (cordelettes de couleurs différentes et à nœuds qui servaient à différents usages) ou les bâtons à encoches comme messages dans toutes les civilisations primitives.
Les peintures rupestres préhistoriques se trouvent à la croisée des chemins. Il a été remarqué que les dessins des grottes de l'époque aurignacienne et magdalénienne contiennent en germe quelque chose qui ressemble à des rudiments d'écriture. Nous nous trouvons alors à une période où les deux modes d'expression ne sont pas encore séparés.
15/01/2018
Commande de six châssis toilés aux « Couleurs Leroux ».
Plan pour une sculpture en métal.
17/01/2018
« Pour que l'écriture soit manifestée dans sa vérité, il faut qu'elle soit illisible. » (Roland
Barthes, Sémiographie d'André Masson, L'obvie et l'obtus, essais critiques III)
Réception d'un courrier de Borislava. Je relève ce passage parce que sa tonalité adoucie certains doutes : « J'aime beaucoup cette clarté et la légèreté qui émanent de tout l'espace ou tes œuvres sont accrochées, saisies sur certaines photos. Je me rends compte du sentiment de satisfaction qui doit t'accompagner dans ton univers depuis des années. Admiration devant ta personnalité accomplie. »
18/01/2018
Reprise d'une peinture sur papier (150 x 180) de 2016. Apport de touches sur la couleur du fond, ce qui rend sa relation aux formes plus synthétique, plus homogène.
Début de mise en place d'un grand polyptyque avec plusieurs peintures de 2003-2004. Cela consiste tout d'abord à disposer les toiles les unes à côté des autres sur le sol de l'atelier. Puis se livrer à de multiples modifications. Essayer des arrangements. Déplacer les toiles.
Rechercher un ordre qui puisse créer un équilibre global tout en préservant la singularité de chacune des pièces constituant l'ensemble. Trouver la bonne disposition, la formule ad hoc. Retirer certains tableaux, les remplacer par d'autres. En intervertir. Veiller aux choix du voisinage des couleurs, de l'intensité chromatique, de la liaison des dessins. Réunir, rassembler des groupes, des catégories de formes expressives dans un champ dont l'aspect communautaire ne nuise pas aux marques distinctives, mais que le rapport du singulier au pluriel soit bénéfique aux deux.
Tout un pan de l'histoire de leur genèse resurgit au fil des ces manipulations. Remonter dans la lumière d'une décennie n'est pas sans effet. Recréer une nouvelle harmonie significative de l'espace qui sépare les actions dans le temps.
21/01/2018
Pour savoir ce qu'il en était de l'organisation d'un atelier d'artiste au début du XIXe siècle, relire la description qu'en donne Balzac dans le prologue de « La vendetta ».
Le nombre de toiles avec lesquelles je cherche à stabiliser un polyptyque est tel qu'il sera possible d'en produire trois ou quatre.
22/01/2018
« Galerie du Sallé, 1972-1994 », une exposition mémoire, visible à l'institut Kelenn à Quimper. Dirigée par Gwenaël Le Berre, la galerie a présenté durant vingt-deux années des plasticiens, peintres, graveurs, sculpteurs, potiers, céramistes, tisserands, photographes, graphistes. Le long parcours de ces activités est retracé à l'aide d'affiches, de photos, de documents. Parmi plus de cent noms, je relève ceux de A. Le Quernec, B. Boulch, B.Bracaval, B. Gould, D. Appelt, F. Béalu, J. Jacob, M. Robelin, M. Thersiquel, R. Sénéca, S.Brelivet, Sougamelisme-Jo, X. Vasseur, Y. Piquet, Y. Doaré, Y. Pazat... Et je n'oublie surtout pas celui de Francine Millo qui produisait de remarquables volumes textiles chargés de lourds tressages proliférants teintés de rouges sombres et à qui me lient des souvenirs particuliers (dans sa maison sur les hauteurs de Pont-Aven, et nos soirées au Shogun, une boîte de nuit alors très en vogue dans le Sud-Finistère).
Ma participation à l'aventure de la galerie s'est concrétisée par une exposition du 15 juillet au 15 août 1989. Dans les locaux de Kelenn, je retrouve les cartes postales éditées alors, des diapositives de la présentation ainsi qu'un article de presse signé F.R. Il est titré Des sculptures et des hommes. Il évoque mes « sculptures totémiques ».
Extraits : « Le visiteur appréciera l'art et la manière de Thaéron pour faire parler les corps à sa manière. Car ces quatre statues sont résolument anthropomorphes affirme le créateur. Il n'y a que l'homme pour se dresser ainsi, vertical. Le reste est une histoire de rêve. En aluminium, en bois, ou les deux à la fois, elles parlent de musique ou d'amour, du vent qui prend dans une girouette. Elles balisent un océan imaginaire ou tendent une bouche pulpeuse à un interlocuteur géant. Il faut être ému par ces formes distendues qui offrent un cou de girafe aux passants tête en l'air. Abritées sous des auvents ou installées dans une cour intérieure, les grandes constructions de Thaéron apprivoisent un espace limité. Elles réussissent à s'imposer et à nous surprendre. Beau et simple à la fois. Essentiel. » Arzela Merling, l'animatrice de Kelenn à qui je présente mes créations me propose une exposition dans sa galerie en 2020.



