



Livret de l’exposition « De Vincent à Théo », Galerie L’ Aire du Verseau, Paris, du 11 octobre au 9 novembre 1985.
Le livret est accompagné par un texte de Jean-Louis Pradel :
« Ce continent perdu que la peinture laisse supposer en soulevant, ici ou là, un coin du voile, en donnant à voir l’incipit d’une histoire sans fin, mérite des cartographes d’une espèce rare qui préféreraient à la minutie occultante du relevé, aux grilles que laissent lourdement retomber les codes et les conventions sur les paupières irrémédiablement closes une espèce de furie hasardeuse d’empreintes et de traces, une rage aléatoire du tracé, d’allusifs amers d’où toujours l’aventure pourrait rebondir, repartir ou se perdre, disparaître corps et âmes. Michel Potage est ainsi du côté de ceux pour qui l’insaisissable fait loi. Comme si aucun chemin n’était assez peu sûr, il ne cesse d’en inventer de plus incertains. A la figure il préfère son ombre, à la ligne la griffure, à la citation d’allusifs délires. Une « écriture » aussi peu notariée que celle d’un Twombly, une « image » de peintre portant bougies sur son chapeau mettant en abîme du combat tragique contre les ténèbres de Vincent Van Gogh, des effets séquences cinématographiques où le mouvement, mais aussi le corps même, se décomposent jusqu’à laisser la place vide, comme après la séance la peinture de Michel Potage est celle d’une passion sans illusion où basculent tous les semblants de certitude où les coups de cœur prennent naturellement la forme d’une palette, ou la couleur celle d’un soleil. Choisissant, sans concession, une périlleuse ligne de crête, ne prenant en compte que les sommets ou les abysses, cette peinture torrentielle envahit l’espace pour laisser voir que tout est toujours à découvrir, que tout est toujours ailleurs, du côté d’une impérieuse nécessité que nous portons au cœur. »