Lundi 28 janvier, 2019, 11:20 Europe/Paris | Actualisé : Mercredi 2 octobre, 2024, 16:56
© Francesco Marino di Teana
Francesco Marino di Teana soude à la brasure la sculpture Hommage à Icare.
Décédé en 2012, Francesco Marino di Teana fait partie de ces artistes discrets et pourtant incontournables. Fruit de 6 années de travail, la publication de son oeuvre, menée par la galerie Loft et le fils de l'artiste, recense plusieurs centaines de pièces. Un bel opus de 800 pages qui est aussi l'occasion de suivre l'itinéraire du sculpteur : d'un petit village de l'Italie à Paris où il fait les belles heures de la galerie Denise René.
Rien ne laissait présager l'avenir de Francisco Marino. Né dans le Sud de l'Italie en 1920, rien ne le prédispose non plus à l’Art. A moins que la proximité sonore de son lieu de naissance, Teana, avec celui de Theana, la femme de Pythagore, ne soit déjà le signe d’un destin particulier. A 5 ans, celui qui ne s’appelle pas encore Francesco Marino di Teana est déjà berger et, dit-il, « apprend les mathématiques comme Pythagore, en comptant les cailloux ».
Echapper au destin
A tout juste 16 ans, issu d'une famille pauvre, son avenir semble déjà tracé : il est maçon. Son frère est enrôlé dans l’armée fasciste et mourra à Stalingrad. Lui fuit l’Italie pour l'Argentine où il pense retrouver son père. Un voyage difficile et un accueil plutôt froid. Francesco n'est pas le bienvenu et doit travailler pour survivre. A force de ténacité, l'ouvrier devient chef de chantier et tente insatiable, d'échapper à son destin. Il suit des cours du soir à l'Ecole Salguero pour devenir architecte. Une réussite qui l’amène ensuite, diplôme en poche, à entrer à l'Ecole des Beaux Arts. Il en sort major de promotion. Paris devient un phare : la ville lumière où se réunissent tous les artistes d'avant-garde depuis le début du siècle.
© ATELIER MARINO DI TEANA
Francesco Marino di Teana dans son atelier
Précédant de quelques années les Julio Le Parc, Horacio Garcia Rossi ou encore Francisco Sobrino, Francesco débarque à Paris en 1952. Une vie de misère à dormir sur les bancs publics en rêvant à son oeuvre. C'est une femme, Huguette Séjournet, sa future compagne, qui lui fera prendre un tournant décisif. Elève de Fernand Léger, Huguette est aussi amie avec Vasarely. Elle le pousse à rencontrer Denise René. Timide, Francesco a rangé quelques maquettes de son travail dans une boîte à chaussures. Denise René ne prête d'abord pas attention à l'ouvrier qui s'est présenté devant elle avant de découvrir avec stupéfaction le travail du sculpteur. Nous sommes en 1957. Francesco Marino di Teana rejoint l'écurie d'artistes de la galerie de Saint Germain des Prés qui compte déjà Victor Vasarely bien sûr, mais aussi Dewasne, Deyrolle, Domela, Gilioli, Gorin, Hartung, Herbin, Mortensen, Poliakoff, etc. Elle lui organise sa première exposition personnelle. Les succès s'enchaînent : le 1er Prix du concours Sculpture pour une usine organisé par saint Gobain où il est choisi par Giacometti Zadkine, Poliakoff et Seuphor, le musée d'Art Moderne de la ville de Paris, des expositions en Chine, au Japon, aux Etats unis. Pour autant, Francesco restera humble toute sa vie.
Francesco Marino di Teana nous laisse des oeuvres monumentales en acier corten dans l'espace public, dontLiberté, la plus grande sculpture d'Europe. Avec ses 20 mètres de haut, elle ouvre la voie à Bernar Venet et Richard Serra. En guise de testament, il nous livre aussi sa théorie tri-unitaire, un théorème artistique et plastique, intégrant le vide à la sculpture. Elle lui permet d'écrire 1+1 = 3. Merci à Pythagore et Teana !
© GALERIE LOFT
Couverture du catalogue raisonné de Francesco Marino di Teana et sculpture Aube
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