
Madame de Valpinçon, le 10.11.22
technique mixte sur toile, diptyque
130 x 194 cm
Courtesy Galerie Berthet Aittouarès
Elles Jean Pierre Schneider
Après avoir été à l’honneur cet été avec une importante rétrospective au centre d’art de Vendôme, Jean Pierre Schneider revient à la galerie dont il fait partie depuis 20 ans avec cette thématique récurrente qui rythme son oeuvre : les femmes.
Les femmes qui traversent l’oeuvre de Jean Pierre Schneider n’ont rien à voir avec ce lieu commun artistique qu’est le nu féminin. Les corps ne s’affirment pas : ils semblent en retrait. Présences fragiles, presque intruses, elles semblent avoir franchi le seuil de la toile comme par effraction. Sans geste, sans action, elles ne font que paraître.
Paraître, mais au second degré. Car parmi elles, deux silhouettes dominent : La servante du 28.XII.09 et Mme de Valpinçon, figures empruntées à Ingres et à Manet. Des images d’images, réduites à leur ombre portée. Est-ce pour cela que ces corps tronqués, bidimensionnels, glissent sur la surface ?
De ces reflets, de ces représentations, il ne subsiste qu’une ressemblance résiduelle avec leur origine. La tête de la Servante se dissout dans le noir, Olympia s’efface pour se transformer en une tache blanche, et Mme de Valpinçon un contour discontinu. Autrement dit, l’art de peindre des limites.
Dématérialisées, ces femmes sont aussi dépersonnalisées. Tantôt elles nous tournent le dos, tantôt leur visage se vide de ses traits – Berthe Morisot - comme si l’identité même se retirait dans l’ombre.
Une figure demeure à part : La Femme sans mots. Comment comprendre ce titre énigmatique ? Cette femme est-elle condamnée au silence, ou bien a-t-elle choisi de se taire comme une forme de résistance passive au monde ? On ignore l’origine de cette image de détresse, ce corps qui paraît se décomposer. Une certitude cependant : si les femmes de Jean-Pierre Schneider viennent d’ailleurs, La Femme sans mots, elle, se dissout lentement sous nos yeux.
Mais les femmes de l’artiste sont-elles vraiment si différentes des figures masculines qu’il peint – les nageurs, par exemple ? Peut-être partagent-elles le même rêve de Jean-Pierre Schneider : des corps qui flottent, qui défient la pesanteur, qui se libèrent des lois de la gravité.