Juste un somme Jennifer Douzenel
Les cimaises recouvertes de crépi invitent l’extérieur à l’intérieur. Sur elles se déploient les morceaux de paysages prélevés ici et là par la vidéaste, les remous nocturnes de la baie de Hong-Kong, le bruissement de millions de papillons monarques au Mexique, les ondulations d’êtres marins captifs en Norvège ou des marcheurs projetés à l’envers sur des tufières en Turquie. Dans la pénombre de la galerie le temps s’arrête au fur et à mesure qu’il défile, lent et sublime. Il se pose, se contemple, et se boucle, à l’infini.
Les vidéos de l’artiste sont la somme d’inconnues énigmatiques, l’addition d’histoires qui n’en sont pas vraiment mais qui, transfigurées par la minutieuse manière de Jennifer Douzenel, font événement. Son geste est minimal, son processus réglé avec soin et méthode. Le phénomène qui capte d’abord son attention la pousse à s’arrêter un instant. L'enregistrement est ensuite un saisissement. De manière quasi instantanée, l’artiste attrape l’image au vol pour la reproduire sur son écran, comme un peintre sur sa toile. Ici, cependant, nulle mise en scène. Le bruit du dehors est supprimé au montage. Les plans sont fixes et muets, seulement scandés dans leur écoulement visuel par les fondus qui marquent un début et une fin.
Filmées sur le motif, les vidéos de l’artiste deviennent autonomes et autotéliques. Les bouts du monde que l’artiste capture, découpe et rend aux publics sont agencés dans ses films comme sur des tableaux.