PARADISE Macha Pangilinan
La première exposition personnelle de Macha Pangilinan à la Galerie Ilian Rebei est l’occasion de faire dialoguer les récentes œuvres picturales de l’artiste avec des sculptures anthropomorphes, ses personnages. Elle évolue dans l’espace comme un voyage au Paradis. Macha Pangilinan interroge des conceptions et des fondements philosophiques et sociologiques de notre société, se plaçant comme observatrice du monde qu’elle esquisse. Elle réalise à travers ses œuvres une analyse du concept complexe de l’éden et recrée ainsi une mythologie parallèle, une analogie entre des vérités multiples.
Dans ses compositions, les baigneuses deviennent des baigneurs et prennent ainsi le contre-pied de cette typologie des genres. Ce sont de jeunes hommes nus qui font face aux spectateurs, autant séduisants qu’intimidants. Ces œuvres s’inscrivent dans la série «Paradise» de l’artiste, qui illustre un monde fictif, idyllique, créé à partir de l’image commune du paradis tel qu’il est représenté et conçu au sein des cultures monothéistes. Habité par des divinités et des êtres mythiques, il apaise et parallèlement, il dérange. C’est un rêve surréaliste où les personnages s’épanouissent dans un état de transformation permanent: ils naissent, disparaissent et renaissent.
Jouant avec l’imaginaire enfantin iconique des petites filles — licornes, sirènes, couleurs pastel et paillettes — Macha Pangilinan nous propose de revivre autrement ces codes de genre, imposés par la société dès l’enfance.
Macha Pangilinan c’est aussi la subtilité d’un regard croisé devenu sur la toile la trace d’un instant fécond. Les sujets semblent flotter et trouver leur existence entre un passé tout juste survenu et un futur tangible. La lumière est pensée de façon à ce qu’elle traduise une absence de temps. Une certaine quiétude s’en dégage.
Ce qu’il y a de plus significatif dans la peinture de Macha, ce sont ses références aux artistes éminents de l’histoire de l’art. Elle se positionne dans le prolongement de ce passé académique et en transcende les patterns. Dans La piscine vide, œuvre picturale charnière de sa récente production, elle exploite les drapés aux plis marqués de Mantegna et par un habile rehaut à la craie, elle vient adoucir la pesanteur du tissu, lui conférant une certaine transparence et davantage de grâce à sa matérialité. Aussi, elle emprunte le thème du miroir aux nombreuses Vénus de l’Art. Cependant, en l’actualisant, le miroir ne traite plus uniquement de la vanité mais bien de la transidentité. Macha Pangilinan s’approprie ces influences afin de les déconstruire et dans un ultime temps, produire une nouvelle narration du paradis, son Paradis.