Portraits, objets et substituts Henri Foucault
Un jour Henri Foucault a vu, puis photographié une collection de Têtes, soit une vingtaine de moulages en plâtre datant d’il y a peut-être un siècle, dont on sait seulement que leurs modèles étaient des Malgaches, distingués par un Français de passage dans l’île.Il y a photographié également des coquillages exotiques réunis par un de ses amis. Et il en a constitué plusieurs en systèmes solidaires, hypnotiques, éblouissants, baptisés Rayonnés. Il y ajoute quelques pluies, ou bouquets s’éparpillant, phosphorescents, d’Étoiles en rayogrammes, et au moins en Autoportrait, poinçonné, toujours en noir et blanc. D’autres ont écrit sur les rapports étroits et fructueux qu’entretient depuis longtemps sa photographie contemporaine avec la sculpture et le cinéma, avec le XIXe siècle et une certaine idée de la modernité- le trouble né de l’Étoile de mer. À cause de Madagascar, j’en appelle à Paulhan, qui vécut là-bas, y devint un peu plus lui-même, et cite ce hain-teny : « Chant des pintades séparées de l’Andringitra, leur corps est ici, mais leur cœur se répète ce qui se passe là-bas. »
Les Têtes livrées au jour font la révélation de cette exposition. Toutes autant qu’elles sont, manifestations vives de l’humain dans son individualité, malgré l’épaisseur du mystère accumulé depuis, malgré l ‘anonymat quasi complet, malgré surtout la violence bien perceptible encore, aiguë, du procédé. Il s’agit de moulages pris sur des êtres vivants pour obtenir leur effigie en plâtre, sculpture montée plus tard sur un court socle portant l’inscription de l’origine ethnique correspondant à chacun (et semble-t-il encore une étiquette au bout d’une ficelle). Que s’est-il alors réellement passé, qu’on ignore ? Il y a eu arrachement, physiquement l’opération est une épreuve.