Toni Grand et Bernard Pagès Toni Grand et Bernard Pagès
Exposition conjointe de Toni Grand et de Bernard Pagès au musée d'art et d'industrie de Saint-Etienne.
L'exposition donne l'occasion à Jacques Lepage de revenir sur la rencontre entre les deux artistes.
"Les rapports entre les pièces réunies ne sont pas systématisés. Il s'agit de l'émergence de parcours, supports dynamiques d'un
type d'inscription.
Le bois rend lisible l'économie de l'écriture. L'outil (la scie, les cales) n'intervient que pour le laisser travailler selon ses propres lois. Et, discret comme le cheminement d'un insecte, la trace-événement qui sinue dans la masse.
L'intervention, l'image qui s'en peut déduire, n'est pas la démarche qui s'impose. Le travail n'est pas le sciage, ni la « mise-en-scène », mais la transformation du matériau dès qu'il a acquis sa liberté, mouvement de nature, témoin du contentieux que l'arbre entretient avec lui-même. On dira que les traces de collage comportent une ambiguïté, qu'elles restituent le marquage, le passage. C'est une difficulté. Il faut la (dé)considérer comme une intervention effacée que le matériau assume :
elle ne s'expose pas.
Atone le signe gomme le vocabulaire. Aucune usure, a peine un usage qui élimine les référents technologiques. Le matériau, le bois, n'est ni façonné, ni porteur de plus-value. Mais il n'est pas pour cela dérivé de son sens, racheté comme détritus, comme rebut.Signe déconnecté. Vacant.
Utiliser le bois, dont l'origine est laissée apparente, évidente, ne solidarise point les démarches de Pagès et de Grand. Celui-ci vit l'aventure de l'arbre, l'accepte dans sa simplicité et la produit. Pagès emploie le bois pour l'astreindre, le réduire à n'être qu'un élément d'une combinatoire, ses permutations déterminées par des impératifs artisanaux ou mathématiques.
Divergence fondamentale entre leur problématique de recherche. Ce qui laisse apparaître en pleine lumière ce qui leur est commun : cet anonymat qui rejette aux mythes l'acte « créateur », ce refus d'apparaître, cet effacement dans le cheminement du matériau ou dans celui du geste ouvrier."
Jacques Lepage