Surréalisme-révolutionnaire

Uni avec les groupes d'avant garde danois et hollandais, les Surréalismes-révolutionnaires vont former le groupe CoBra. Issus du Surréalisme et communistes, ses membres attaquent frontalement André Breton par l'intermédiaire de Christian Dotremont et souhaitent réactiver les principes fondateurs du mouvement, alors essoufflé par les années de guerre et l'omniprésence de son fondateur.

Textes fondateurs
MANIFESTE DES SURREALISTES-REVOLUTIONNAIRES EN FRANCE

Le pas de parades des centuries gaullistes ébranle déjà nos fenêtres. 
Goebbels se met à parler français dans "L'Aurore" pour appeler à l'extermination des marocains, des algériens, des nègres.
Les troupes de choc du fascisme s'exercent au pillage, au lynchage, aux autodafés.
Le capitalisme anglo-saxon encercle l'Europe libre.
A travers le monde, les bandes du télégraphe se déroulent dans le sang des Vietnamiens, des Malgaches, des Grecs.
A nouveau, la liberté doit allumer partout ses feux de position.

MAIS LE SURRÉALISME (1) NE RÉPOND PAS
Où est-il ? Replié, noué en lui-même, les malentendus l'ankylosent.

Il se regarde dans la Révolution, et il ne se voit pas.
Il cherche partout où il devrait être, mais il ne se voit pas.
Il cherche partout où il devrait être, mais il n'y est pas ; il se trouve dans tout ce qui lui est hostile : il se voit mis en niche, collé au mur, condamné, déguisé en soutien-gorge, en eau minérale ; il fuit devant son image défigurée ; il se réfugie dans la solitude ; il se reprend dans l'hérésie.

(1) il s'agit ici dur surréalisme tel qu'avec André Breton, de granit en brumes, il est finalement nié.


MAIS LE SURRÉALISME EST RESPONSABLE
Il est responsable de sa présence en mannequin boulevard Montmartre.
Il est responsable de son absence pratique dans la Révolution.
De n'avoir pas su se situer sur le plan d'une efficacité permanente, sans cesse déterminée par les contours m^mes de l'action révolutionnaire, il est devenu à la fois cette ombre sur le mur et ce trou béant.

Le surréalisme est devenu ce que ses adversaires voulaient qu'il soit. Il s'est soumis au sort auquel l'ennemi le vouait. A ce point de sa vie, il semble ne plus découvrir de justification que dans son échec, de grandeur que dans le renoncement, d'adhésion que dans l'affection, de triomphe que dans la défaite. (1)

Alors qu'il importait de doubler sa vigilance intérieure d'une vigilance politique tournée vers une connaissance des conditions faites au mouvement révolutionnaire, il a cru trouver dans sa seule rigueur intime les éléments d'appréciation des deux activités.

Tandis que la balance de la révolution opère dans l'événement, le surréalisme (2) se pèse dans l'expérience. Ces deux plans sont distincts, irréductiblement. Il ne peut y avoir de surréalisme conjoncturel, pas plus qu'il n'ya d'expérience politique : il n'y a pas.

IL NE PEUT Y AVOIR DE SURRÉALISME POLITIQUE

La synthèse du surréalisme et du communisme, l'identification théorique  de leurs efforts est impossible et l'acharnement mis pendant vingt ans à réaliser une telle résolution a contribué, pour une large part, à nuire à leurs rapports.

L'ACTION du communisme, de son parti, s'impose dans l'immédiat ; l'EXPÉRIENCE surréaliste se déroule selon des normes qui lui sont propres. Il ne sautait être question de soumettre l'une à l'autre ; il n'y a pas entre elles de moyens communs.

(1)"Groupe de pointe, fatalement vaincu...", Julien Gracq, Fontaine, n°58).
(2) Il s'agit maintenant du surréalisme.


POUR ÊTRE RÉVOLUTIONNAIRE L'EXPÉRIENCE EXIGE :

1° Que soit établie, une fois pour toutes et clairement, une distinction entre les deux plans du combat révolutionnaire et de la recherche surréaliste ;
2° Qu'il soit entendu, une pour toutes et clairement, que la recherche surréaliste ne peut être conçue qu'au contact de la réalité sociale et pour une mise en pratique révolutionnaire ;
En particulier que le surréalisme prenne conscience des conditions de la lutte du prolétariat dans le monde afin qu'aucune de ses manifestations extérieures ne puisse lui être imputée à grief contre la révolution.


POUR NOUS EN 1947,

Le parti communiste, et le parti communiste seul, non seulement porte en lui les sports d'une transformation effective du monde, telle que le surréalisme l'a toujours voulue et proclamée comme la condition impérieuse d'un changement de la vie, mais encore il détient seul les chances qu'a cette volonté d'aboutir.

Pour nous, les fondements de la révolution sont en U.R.S.S. eeew La Défense du pays des Soviets en face du capitalisme mondial à nouveau braqué tout entier contre lui est le devoir premier d'un révolutionnaire.

Pour nous, du dégoût de la société bourgeoise, de la révolte qui nous pousse à l'abattre, de la nécessité d'une transformation des bases économiques de la société POUR changer la vie, il ne saurait y avoir d'autre conséquence que LA RECONNAISSANCE DU Parti COMMUNISTE COMME SEULE INSTANCE RÉVOLUTIONNAIRE.

L'adoption d'une telle discipline, fondée et entretenue par une VIGILANCE POLITIQUE qui ne heurte pas mais complète la RIGUEUR DE LA RECHERCHE surréaliste, ne signifie en rien l'aliénation d'une liberté dont cette recherche a le besoin le plus absolu pour se poursuivre dans le champ où le surréalisme reste encore seul engagé.


Le Parti communiste n'a jamais prétendu déterminer a priori le style été l'éthique d'une société sans classes. Les investigations auxquelles se livrent les surréalistes ne peuvent en rien gêner l'action du prolétariat jusqu'au moment où, à l'extérieur, l'utilisation d'un résultat partiel et momentané d'une expérience serait faite par des contre-révolutionnaires à des fins contre-révolutionnaires, jusqu'au moment où l'expérience la plus libre servirait les ennemis de la liberté.

Il appartient au surréalisme, aux surréalistes, de se garder d'un risque aussi grave en se soumettant à une activité rigoureusement collective été en tenant pour importante, sinon essentielle, l'appréciation constante du progrès révolutionnaire.

On ne connaît pas une biologie communiste, mais il y a des biologies communistes. On ne connaîtra pas de surréalisme communiste, mais il y aura des surréalistes communistes.

Leur rassemblement doit s'effectuer sur la base des deux mots d'ordre suivants qui, à perte de vue, n'en font qu'un :

- AIDE POSITIVE AU Parti COMMUNISTE FRANÇAIS ; RECONNAISSANCE DE SES DIRIGEANTS RESPONSABLES ET ACCEPTATION DES DÉCISIONS POLITIQUES PRISES PAR LES ORGANISMES RÉGULIERS DU PARTI.

- LIBERTÉ TOTALE D'EXPÉRIMENTATION POUR LES AMIS DE LA LIBERTÉ.

Été 1947.
Suzan ALLEN, Noël ARNAUD, Yves BATTISTINI, Lucien BITON, Max BUCAILLE, Paulette DAUSSY, Raymond DAUSSY, Pierre DESGRAUPES, Pierre DUMAYET, Pierre DUMOUCHEL, Jacques HALPERN, Édouard JAGUER, Hubert JUIN, Lucien JUSTET, Jacques KOBER, Jean LAUDE, René PASSERON, Tibor TARDOS.

Adresse provisoire : Surréalisme-Révolutionnaire, 18, rue Commines, PARIS 3e.

Artistes associés

Suzan Allen, Noël Arnaud, Yves Battistini Lucien Biton, Max Bucaille, Paulette Daussy, Raymond Daussy, Pierre Desgraupes, Christian Dotremont, Pierre Dumayet, Pierre Dumouchel, Jacques Halpern, Édouard Jaguer, Hubert Juin, Lucien Justet, Jacques Kober, Jean Laude, René Passeron, Tibor Tardos.

Artistes à rapprocher

Pierre Alechinsky, Karel Appel, Jean-Michel Atlan, Eugene Brands, Pol Bury, Jacques Calonne, Georges Collignon, Constant (Constant Niewenhuys), Corneille, Jan Niewenhuys (frère cadet de Constant), Henry Heerup, Egill Jacobsen, Asger Jorn, Joseph Noiret, Carl-Henning Pedersen, Anton Rooskens.
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Courant, mouvement, lieu à rapprocher

Experimentelen, CoBra, Mouvement International pour un Bauhaus Imaginiste (MIBI)